GOINGWEST
Le Webzine du Projet52
Un départ ? Et comment ! C’est un aller sans retour que je viens de réserver. L’année 2018 a été émotionnellement très chargée alors il est de temps de prendre le large. De partir, et pourquoi pas sans retour ?
3 septembre 2018, (pour la huitième fois depuis le début de l’année j’embarque dans un avion avec comme un seul cap l’Ouest, comme seule vue l’horizon), après 8 semaines passées entre sauce tomate, champignons et fromage, est arrivé le moment de rendre le tablier, aussi vert que les montagnes qui nous entourent. La saison se termine ; chacun des saisonniers reprend sa vie, ses études… son quotidien ; chacun dépose son uniforme, son badge et ses clés au bureau. Pour ma part, j’ai plus de 2 000 pizzas dans les biceps, un peu de farine sur mes affaires, quelques compétences à ajouter à mon CV mais surtout des souvenirs plein la tête : des paysages grandioses, des amitiés à chérir et des promesses de retrouvailles dans des pays encore inconnus.
Je range les affaires que j’avais éparpillées du sol au plafond de ma petite caravane, je démarre la voiture et lance un dernier regard à celles et ceux qui ont participé à rendre cet été plus supportable malgré la chaleur du four, les interminables commandes et les jours de tempête. Je quitte la Savoie avec la certitude que les montagnes gardent en mémoire les souvenirs de ces dernières semaines et il semblerait qu’aujourd’hui seul le vent se chargera de me guider jusque dans le Sud.
Mais ça n’est qu’une étape… Je passe voir mon oncle, ma tante, mes cousines autour d’un petit-déjeuner improvisé… Je retrouve une amie de la famille, chère à mon coeur et, le temps d’un café, on se raconte la vie, le temps qui passe… des babioles sans importance… un petit moment suspendu qui recharge les batteries. Je quitte Manosque, au coeur de la belle Provence, pour les Pyrénées… le paysage se transforme et au loin la chaîne re-dessine l’horizon.
Pau ne sera, encore une fois, qu’une étape. De 48 heures. Je retrouve mes parents… et ma grand-mère nouvellement installée ; comme à chaque fois, on dirait qu’on s’est quittés la veille. 48 heures ensemble : c’est aussi normal qu’étrange… Au diable la fatigue et le manque de sommeil ! chacun sait que ces instants ensemble sont précieux. Alors on profite et on ne s’offre rien de plus, rien de moins, que du temps et, la veille de mon départ en fin de journée, je me dis qu’il est probablement temps de refaire ma valise. Moment insolite dans le salon familial, devant les yeux amusés et intrigués de ma famille qui m’observe entasser dans un sac de 60 litres tout ce que je possède au monde. Le temps passe ; (re)vient le moment des au-revoir. Ce n’est pas facile. On s’enlace. On se murmure quelques mots d’amour, quelques mots d’encouragements et… je laisse sur la quai de la gare de Pau quelques morceaux de mon coeur, déchiré de ce nouveau départ… emballé de ce nouveau départ… Mais toi et moi on sait que le premier pas est toujours le plus dur, alors sèche tes larmes maman, on se retrouve très vite.
J’accomplis un dernier travail photographique près de Bordeaux et me voilà à nouveau dans l’espace pressurisé d’un avion, direction le grand Nord (toujours dans la modération). Je décolle de Bordeaux (c’est une première) pour la jungle parisienne : métro, bus, train… Et enfin la rame s’arrête dans une gare de l’Oise, aux portes de la Capitale. Là sur les quais… Laure, (que tu connais maintenant aussi bien que moi), m’attend. J’ai du mal à dissimuler le plaisir de retrouver un visage familier, de lui raconter, de l’écouter, d’en rire et de partager un moment à quelques heures seulement de mon départ pour l’étranger.
Quand tu penses qu’il y a un an, presque jour pour jour, Juliette venait me chercher devant l’épicerie de Sacré Coeur, Quebec et je m’apprêtais à rencontrer toute l’équipe (dont Laure) de Canopée 2017.
Aujourd’hui, on se retrouve en France pour s’offrir juste une parenthèse, juste une pause… et une promesse : des retrouvailles ! Des retrouvailles dans l’Hémisphère Sud… L’aventure ne s’arrête jamais !
Depuis, les jours ont défilé : d’avions en escales ; d'heures d’attente dans des halls d’embarquement en passages à la douane ; de bouchons sur l’autoroute en "petites routes" isolées… me voilà enfin arrivée dans le Colorado d'où je t’écris ces nouvelles. Au Sud des Rocheuses, ce massif qui ne connait pas de frontières humaines, et qui relie le fabuleux Canada au Mid-West américain. C’est dans ce désert merveilleux, à plus 1 700m d’altitude, que je pose mon sac pour 5 semaines.
Colorado rime avec Shirley et Danny, que je ne te présente plus, et chez qui je reviens année après année… (Il y a 3 ans je découvrais le comté de Montrose avec des étoiles dans les yeux et aujourd’hui je retrouve très naturellement mes habitudes dans cet endroit qui est devenu très familier au fil des ans. 700 âmes sont installées à Nucla, cette petite ville sans prétention qui a inscrit dans sa Loi, depuis 2013, que chaque foyer DOIT posséder une arme à feu. Ça te met dans l’ambiance. Ici c’est l’Amérique. La vraie.) On se voit 2 jours, le temps de passer les consignes et pour eux de boucler les valises et de s’envoler vers l’Europe pour quelques semaines de vacances. Moi je reste. Ça change !
Voilà presque 10 jours que je suis arrivée en Amérique. Je vais sûrement te surprendre en te disant que cette solitude… je l’attendais avec une certaine impatience. Non pas que je sois une sorte d’ermite misanthrope… mais j’avais besoin de me poser, de me retrouver. Tu sais, juste avoir le temps de me reposer, de travailler sur mes projets photo, de me balader, de lire… de profiter… et tu sais quoi ? ça fait un bien fou de n’avoir pour objectif quotidien guère plus que promener le chien Kirby, sortir les huit moutons de la pâture, nettoyer les abords de la maison ou récolter les légumes frais du jardin , de les cuisiner et m'en régaler, peindre, découvrir, ou juste flâner au soleil… et préparer la suite de mes voyages.
D’ailleurs, dans quelques semaines, devine où je serai ? Oui ! Dans un avion. Un autre. J’embarque bientôt pour 3 jours de voyage littéralement à travers le continent américain : 13 400 kilomètres entre le Colorado et… le pays du tango, du Mate et des Pesos. Je te retrouve donc le moins prochain en plein coeur de l’Argentine.
D’ici-là, sache que je reçois régulièrement des messages de toi qui, derrière ton écran, lit fidèlement mes aventures. Je tenais à te dire merci de prendre quelques minutes pour m’écrire ou m’appeler et merci pour tes encouragements. Sache que tu arrives à me faire rire ou pleurer d’émotions et que ça fait un bien fou.
Merci d’être là et de le faire savoir.